De retour de Sainte-Soline, la méga-bassine protégée par l’Etat

Bonjour,

Je vous partage le retour de mes impressions, mes moments d’émotions et des liens vers cet évènement incroyable d’élan, de solidarité et d’humanisme de cette lutte devenue un symbole de résistance à l’accaparement de l’eau.

Nous ne sommes pas seul.e.s !

Arrivé.e.s la vielle de la manifestation, nous avons été accueilli chaleureusement par la ville de Melle. C’est une ville qui pratique les assemblées citoyennes et qui n’a pas peur d’aborder les thèmes de l’écologie ou de la place de l’art par exemple. Tout au long du week-end la ville a mis à disposition ses moyens techniques et humains et a exprimé son ouverture et son soutien à notre lutte. La première soirée a été extraordinaire : dans une salle comble, les Alliances internationalistes des mouvements populaires et autochtones pour la défense des droits à l’eau nous ont apporté leurs soutiens et les témoignages des luttes pour le partage de l’eau dans leurs pays.

Témoignage poignant de Layla Staats, une autochtone Mohawk, militante pour les droits d’accès à l’eau, qui était à la manifestation de Ste Soline.

Face aux violences policières auxquelles elle a assisté, et que doivent malheureusement affronter les militant.e.s pour l’accès à l’eau partout dans le monde, elle rappelle la nécessité de désobéir, de renforcer nos luttes internationales et livre un message d’amour extrêmement puissant.

“Et j’ai vu ça là-bas, j’ai vu beaucoup d’amour”

Le jour du rassemblement

Alors que les forces de l’ordre ont adopté une stratégie de repli concentré, j’ai vu toutes les générations marcher dans la “zone interdite” parcourant les 6 km en cortèges denses et parallèles pour rejoindre la bassine. De toutes parts, l’horizon était marqué par des marées humaines convergentes. J’y ai vu un élan, une puissance des consciences refusant l’impasse imposée par l’agro-industrie et dont le premier complice est l’Etat.

toutes les images dans le lien ici

Les cortèges colorés et accompagnés des sonos et des batucadas ont finis par buter sur une ligne défensive, organisée comme une motte féodale : une rangée de véhicules de CRS ou militaires, un grillage, un chemin pour le camion-canon à eau, parfois une autre rangée de véhicules en rang serré, une ligne de pieux ou de barbelés, une butte de 5 m de hauteur et derrière, l’eau comme un butin confisqué pour quelques-uns.

L’incroyable barbarie des forces de l’ordre

C’est douloureux d’en parler, l’ambulance du SAMU bloquée par la police alors qu’un manifestant est en pronostic vital engagé, l’arrivée du blessé au CHU de Poitiers 3h40 après le premier appel des secours, les tirs de grenades vers les équipes médicales en soin, la charge par l’arrière des quads policiers, les contrôles policiers des personnes à l’hôpital, tout cela est insupportable. Un groupe d’observateurs de la Ligue des Droits de l’Homme était sur place en première ligne pour rapporter leurs témoignages. Voici leur 1er rapport. Je pense aux personnes blessées et aux conséquences sur leur vie. Le bilan provisoire des blessées et des gardes à vue est ici. Le soir et le lendemain, des espaces de parole et d’expression ont permis de décharger les esprits de la rage accumulée durant la journée.

L’engagement et la désobéissance civile, c’est la démonstration de l’échec de notre démocratie car si on pouvait se faire entendre et influer les choses, on n’aurait pas besoin de ces modes d’actions.

Charlène, activiste présente à Ste Soline

La plantation de 300 arbres, la construction d’une serre maraichère durant la journée ont aussi donné une ouverture vers d’autres moyens de lutte, complémentaires.

extrait de Night and Sleep
Evelyn De Morgan, 1878

La fête et la chaleur humaine le soir et le lendemain pour continuer la lutte

Merci aux organisateurs organisatrices qui ont déployés toutes ces festivités et moyens d’accueil. J’en retiens la poésie des danseuses aux bassines, sur la place à Melle, le fest-noz du samedi soir (incroyable !), le forum émouvant au cinéma, les affichages et permanences pour l’attention à toutes les formes de violence, la solidarité des personnes venues d’Amérique du sud, du Kurdistan, du Canada, du Mali et sans doute d’ailleurs encore.

extrait de Angels (Paradise)
Mikalojus Konstantinas Čiurlionis, 1909

A bientôt ici ou là-bas, François